vendredi 26 mai 2017

La fin des pâturages communs d'Arnex


En 1821, les pâturages communs sont partagés en parcelles et loués aux agriculteurs,

C’est la fin de chauchis !

Après l’affaire de la suppression du libre parcours (1806-1815) une nouvelle modification de l’utilisation de l’espace agricole de la commune est à l’ordre du jour.

Prenons connaissance de cet extrait du Conseil général d’Arnex daté du 10 novembre 1821 :

Le Conseil général de la Commune d’Arnex assemblé sous la présidence de François Monnier Syndic pour traiter des objets ci-après.

Proposition de la municipalité d’Arnex au Conseil général du dit Lieu.

Sur une pétition de 19 bourgeois de cette commune se disant agir pour 20 autres ; signée le 25 octobre, remise à Monsieur le Juge de Paix pour la transmettre au Conseil d’Etat par laquelle les pétitionnaires demandent :

1° Que le partage temporaire du terrain susceptible d’être mis en culture tel que celui de Saugette, Sangolin et Bullandaz soit fait et distribué aux Bourgeois à charge de payer les impôts dus à raison de ce terrain.

2° Que les marais contenant plus de 100 poses soient amodiés et fauchés afin qu’ils produisent une rente plus considérable que celle de 10 batz par bête les pâturant et donné à tous les bourgeois la quantité égale de se procurer ce foin.

3 ° Que les 112 £ que la Commune paye annuellement pour le salaire des taupiers soyent répartis sur les propriétaires à proportion de la quantité de terrain que chacun possède ainsi que cela se fait ailleurs ;

4° Que les frais occasionnés par l’achat et l’entretien des taureaux bannaux soient pareillement répartis sur les propriétaires de bétail ou couvert par une contribution basée sur la quantité de cornes que chaque particulier possède.

5°Qu’enfin ils se plaignent que la Municipalité a distribué ces années précédentes dex bons chars de bois de chêne à une partie des bourgeois tandis que l’autre partie n’a reçu qu’un char de mauvaises Dailles. Et que de telles distributions ne doit avoir aucune différence, chacun devant recevoir une part égale.

Cette pétition ayant été communiquée à la Municipalité par le dit Monsieur le Juge de paix le 17 novembre ; l’ayant prise en considération pour que le Conseil d’Etat ne fut pas appelé à se prononcer sur tous ces différents chefs ; elle a délibéré au contraire de préparer au Conseil général de délibérer.

1°Que dans cette assemblée convoquée exprès tous ceux qui demandent du terrain se fassent inscrire afin que lorsque le nombre sera connu la Municipalité puisse marquer la quantité de parcelles qu’il faudra et fixer l’impôt que chacun devra payer équitablement en se fondant sur la valeur intrinsèque du terrain. Adopté

2° Que ces parcelles seront marquées sur les Saugettes, Sangolin, Bullandaz et le long de l’Etang ; ensuite tirées au sort, numéro par numéro pour en jouir pendant 15 ans à la charge d’y mettre chaque année un char de fumier par quarteron ; et de se conformer en outre aux conditions qui seront faites pour régler cette jouissance ; Adopté

3°Que les Marais pourront être divisés entre tous les bourgeois ; chaque portion taxée selon la qualité ; tirée au sort et jouir pendant le même nombre d’années aux conditions il en a emporté de la Partagée. Et que le pâturage ne sera plus exercé sur aucun bois ; Adopté.

4° Que le taupier sera payé désormais pour une juste répartition de son salaire sur tous les propriétaires du territoire d’Arnex à raison de tant par pose ; Adopté

5° Que l’achat et l’entretien des taureaux bannaux seront également répartis sur tous les propriétaires de bétail à cornes comme veut la pétition ; Adopté

6° Et pour qu’il n’a ait plus de récriminations ni de différences entre les copropriétaires, les parties d’affouages soit distribution de bois se feront chaque année au même endroit également que possible ; Adopté



Le Conseil général les tous adoptés pour être exécutés et a délibéré de son partage : deux quarterons à chacun de ceux qui en demandent dans le Chauchi de Saugette

N°1   Le nombre de ceux qui ont demandé du terrain à cultiver est de quarante-six.

N° 2  L’assemblée étant composée de 73 particuliers pour délibérer pour le Partage de ce   territoire.

N° 3° passant au délibérer pour combien de quarteron en en voulois partager, il se trouve 25 voix pour quatre quarteron et 40 pour duc quarterons

N° 4° délibérer dans lequel des chauchis on voulois les marquer, il s’est trouvé 33 voix pour Saugette et 27 pour Sangolin.

N° 5° Délibérer pour le maret, il s’est trouvé 37 voix pour le partager et 35 voix pour le pâturer

Ainsi donc, suite à cette pétition, la Municipalité, avec l’accord du Conseil général, donne raison à leurs auteurs et va louer aux agriculteurs et bourgeois d’Arnex de nouvelles parcelles tracées sur les chauchis de la commune. Elle va aussi mettre en mise, non pas la parcelle, mais la récolte du fourrage.

On appelait cela les mises de fleurie, une pratique qui a disparu.

Le livre des mises communales

Dès 1824 toutes les mises de terrain, mais aussi de fourrage, du four ou du moulin seront inscrites dans ce grand livre conservé dans les archives communales.






Registre des Mises de la Commune d’Arnex commençant avec les listes de 1824





Première page de ce registre



Le marais de la plaine de l’Orbe sera le dernier territoire à être utilisé comme pâturage communal.

Mais suite aux travaux d’assainissement de la Plaine de l’Orbe, une partie de ce terrain va être vendu en en 1924, soit 56 ha côté Bavois du Nozon.

La vente d’une partie du marais

En 1906, M. Souza de Paris souhaite acheter le marais ; la Municipalité répond qu’elle est disposée à en vendre une partie, soit 30 à 40 poses, au prix de 2.50 fr. la perche, soit 1250 fr. la pose. Cette affaire demeure sans suite.

La SGG (Schweizerische Gemüse Gesellschaft), sise à Chiètres, achète de grandes surfaces agricoles, souvent dans les régions marécageuses du Seeland, de la plaine du Rhône et de celle de l’Orbe, pour y développer des cultures maraîchères. Ainsi, en 1924, elle fait à la Commune une offre de 550 fr. la pose pour le Grand Marais et 575 fr. pour le Petit Marais et le Marais Neuf. Le 23 juillet 1924, le Conseil donne son accord pour la vente de 56 hectares, soit 124 poses à 580 fr., avec location de 1925 à 1930 et entrée en possession au 1er janvier 1930. Le prix du fermage est fixé à 25 fr. la pose pour les deux premières années, et à 30 fr. les trois suivantes.

La vente des marais rapporte 71'000 fr. dont il faut déduire 3'000 fr. de gravier pour les chemins : force est de constater que le prix final est beaucoup plus bas que les propositions précédentes. Ces 71'000 francs servent à diminuer la dette contractée en 1921 pour la construction du collège, qui a coûté quelque 340'000 francs.

Les domaines de la SGG sont repris par COOP Suisse, qui finit par les revendre à la fin du XXème siècle

Et tout le secteur situé à l’ouest du Nozon sera loué par parcelles.

Comment louer les parcelles communales

Durant de nombreuses années, les parcelles communales sont réparties par mise. Le meilleur enchérisseur louant la parcelle. Mais cette façon de faire a posé problème avec l’application du droit foncier car souvent le montant de la mise était trop élevé au vu de la législation sur le fermage.

Pour éviter des montants spéculatifs, l’Etat a fixé des limites  et mis en place le contrôle des fermages, ainsi au fil des ans s’est mis en place tout un arsenal législatif visant à contrôler le montant des fermages pour les domaines et les parcelles.

Fermages et bail à ferme agricole dans le canton de Vaud

Qui fait quoi

Le Service de l'agriculture assure d'une part la surveillance des compétences légales déléguées à la Commission d'affermage, dont le secrétariat est assuré par Prométerre; d'autre part, il fournit à la Commission d'affermage les préavis relatifs au montant des fermages licites, calculés en principe par des bureaux d'experts privés. Enfin il exerce un contrôle général de l'application de la loi en matière de fermages maximaux et d'affermage par parcelles.



L'essentiel

Les relations contractuelles entre bailleurs et fermiers sont soumises aux règles de droit public de la loi fédérale sur le bail à ferme agricole et de la loi cantonale d'application. Le contrôle des conditions d’affermage et les autorisations cantonales s'appliquent principalement aux situations suivantes:

·        approbation de la durée réduite de bail (durée légale minimale vignes:12 ans; domaines: 9 ans; parcelles et alpages: 6 ans);

·        autorisation de l'affermage par parcelles d'une entreprise agricole (démantèlement par affermage, soustraction, même partielle, d'une parcelle ou d'un bâtiment);

·        approbation du montant du fermage des entreprises et des alpages.





Les fermages indicatifs du canton de Vaud



Avec cette nouvelle législation, il appartient à la Municipalité de procéder à la répartition des terrains communaux en respectant la législation fédérale en la matière.

 Pour ce faire elle dispose des possibilités  suivantes :

a) Maintenir le statu quo et distribuer les parcelles rendues à la commune après un arrêt d’exploitation

b) Refaire des lots qui seront tirés au sort par les intéressés

c) Tout reprendre le dossier et étudier une nouvelle distribution plus équitable

En 1987 nouvelle répartition pour la période 1989-94

Ainsi, par exemple en 1987, la Municipalité d’Arnex s’est lancée dans cette délicate opération.

Avec au départ la situation suivante :

Le locataire le plus important disposait de 11.7 ha, le second de 7.9 ha et le 3ème de 4.5 ha, ensuite 11 paysans disposaient de 2 à 3 ha. Et 6 à 7 ne louaient rien à la commune.

Après enquête auprès de tous les agriculteurs, il est apparu que la quasi-totalité souhaitait un peu plus de terrain et une répartition équitable.

Mais ce terme est à signification variable !

Equitable pour les petites exploitations signifiait un peu plus pour elles, mais pour les grands domaines une répartition équitable voulait dire la même surface à chacun !!

La répartition de 1987

Pour finir la Municipalité a repris 6 ha aux deux locataires les plus importants et attribué un hectare a à 6 exploitants qui n’avaient quasi rien.

D’autres critères viendront par la suite : les municipalités suivantes ont introduit d’autres critères pour décider cette répartition en tenant compte de l’âge de l’exploitant ou l’obligation d’habiter dans la commune.

Actuellement en 2017, la commune met en location une cinquantaine d’hectares et  3'000 m2 de vigne aux agriculteurs du village, cet héritage de chauchis communaux  fait rentrer chaque année près de fr. 40'000.- dans la caisse communale!


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