mercredi 9 août 2023

La Dent de Vaulion et Blanche Neige

 Blanche Neige et le chalet de la Dent de Vaulion

 


                                    Chalet de la Dent de Vaulion rénové en 2022


                                               Une peinture de Blanche Neige

 

En 2022 la commune de Vaulion a complétement rénové le chalet de la Dent de Vaulion.

Des travaux importants devisés à près de Fr. 900'000.-

 Selon d’anciennes cartes postales, on constate que ce chalet a souvent été modifié au cours des ans.

http://arnexhistoire.blogspot.ch/2015/08/les-chalets-de-la-dent-de-vaulion.html

 

Ancien chalet de la Dent de Vaulion, carte postée en 1907 

Fort heureusement, ces derniers travaux de rénovation ont maintenu les quelques dessins de Blanche Neige figurant sur les murs d’une salle du 1er étage.

 

                                                                     Nains musiciens

 

 Départ au travail



Il serait utile de dire deux mots de l’auteur de ces peintures.

Ces dessins sont l’œuvre de Robert Lavenex (1908-1993).

Il était agriculteur, viticulteur et même apiculteur à Arnex sur Orbe.

En 1942, il avait épousé Blanche Goy (1916-2004), une demoiselle de Vaulion.

Ils ont  eu deux filles et deux garçons.

Durant sa vie, souvent en hiver, il a réalisé de nombreux paysages de la région pour de quelques clients du village.

 


                                                     Château d’Arnex        


                                Abri pour le bétail du Fonds des Vaux


 


                                                             Robert Lavenex                                                                                          

                                                 

                                                        Blanche Lavenex-Goy     (Photos Pellegri)

 

Selon sa fille, c’est durant la mobilisation de 1939-45 que Robert Lavenex a fait ces premières esquisses dans le chalet de la Dent de Vaulion, mais au cirage !

Il est revenu plus tard donner une autre allure à ces œuvres de guerre. Comme l’indique le dessin du prince et Blanche Neige qui est un peu caché depuis des dernières transformations de 2022, ce devait être en 1969.

En fait il est encore bien là, juste caché par un meuble !

Le prince n’a peut-être pas une glorieuse allure, mais ce dessin est important car comporte la signature du peintre et la date de la rénovation.

Dessin comportant la signature de Robert Lavenex et la date de 69

 

 

 

 

 

 

La Mob de 1939-45 au chalet de la Dent de Vaulion      (Photos et cartes de sa fille )



 

            

Le soldat Robert Lavenex en pleine observation à la Dent de Vaulion

 

Avec quelques cartes de son cru datant de cette époque.

       








        












lundi 24 avril 2023

Deux mots de l'histoire du Moulin Bornu

 

Deux mots  à propos du Moulin Bornu de Pompaples




 

Inutile de revenir sur son histoire, Eugène Mottaz l’a déjà fort bien rédigée dans son Dictionnaire historique du canton de Vaud de 1914.

 




  

 

De 1811, jusqu’à nos jours, en reproduisant quelques articles de presse  citant ce moulin


A cette date de 1811, le citoyen Magnenat d’Orny cherche un locataire.

Mise en location de 1811

 

En mai 1847, Du Pasquier d’Orny le met en vente. Ce bâtiment comprend en plus moulin de nombreuses installations, soit une gruère, deux mécaniques  battre, une forge, une scierie une huilerie et deux pierres  rebattre le chanvre ou le lin.


                                                                Vente de 1847

 

Puis en 1887, soit 40 ans plus tard, on procède  à une liquidation aux enchères.

 




Vente aux enchères de 1887

Avant cette date on cite encore le nom des meuniers : Heinrich et Hugentobler.

Lors de la vente aux enchères  de 1887 le géomètre William Nordhof l’achète pour un tiers. 

Ce sera sans doute pour Louis Chabloz (1840-1926) qui va quitter le moulin de Pompaples et s’installer au moulin Bornu.

Mais Louis Chabloz n’a pas de chance, le 19 juillet 1902, il est victime d’un grand incendie qui va détruire tout le moulin.


                            L’incendie du moulin Bornu de juillet 1902

 

 

Mais Louis Chabloz va reconstruire ce moulin comme le montrent les deux cartes postales suivantes :


 
Carte postale du Moulin Bornu expédié en 1905

 

 

Carte postale du Moulin Bornu expédié en 1910

 

Ce moulin utilisera surtout l’énergie du canal de l’Augine. Ce canal part du Nozon en dessous de Saint Loup pour un parcours d’une longueur de 1km.


 Départ du canal prélevant l'eau du Nozon en dessous de Saint-Loup

A la sortie du moulin, après les turbines, dans le petit bassin situé devant le moulin, les eaux devront choisir leur destination entre la Venoge ou un retour aux eaux du Nozon vers Orny.

Ce bassin que deviendra ainsi le Milieu du monde.

Le bassin devant le moulin Bornu

 

Très tôt ce moulin sera aussi raccordé au réseau de l’usine électrique de la Venoge, comme le note le rapport de 1902.


 

Le rapport de la Société de 1902 cite le moulin Bornu comme abonné

 

Un cas de pollution dû au moulin :

 



Construction des silos de 1929

Plus tard en 1928 et 1929, les Chabloz érigent de grands silos pouvant recevoir 150 wagons, et construisent une voie ferrée conduisant au moulin.

 

Le moulin avec les nouveaux silos de 1929

 

Mais durant cette construction, deux ouvriers chuteront à l’intérieur d’un silo. Mais fort heureusement ils s’en tirent juste avec quelques fractures.

 

 

En 1937 le moulin devient une société anonyme.


 

En 1948, Henri Chabloz et ses deux fils, dont Edmond (1899-1984) reprennent la relève.

 

Publicité pour les produits du moulin

 

Mais pour des raisons que j’ignore, le frère et la sœur d’Edmond souhaitent se séparer de ce moulin.

En 1953, Edmond doit mettre fin  son activité de meunier au moulin Bornu et part habiter le château de Gingins.

Château dont il exploitera le domaine agricole. Au départ avec la collaboration de sa fille qui vient de terminer ses Études de droit. En mai 1956, il met à l’enquête la construction d’une porcherie d’élevage.

Dans cette localité de Gingins, Edmond Chabloz exercera le mandat de syndic une vingtaine d’années, soit de 1961 jusqu’en 1981.

Il aura trois enfants.

Mais il aura la douleur de perdre son fils aîné, emporté par une avalanche aux Grisons en 1961.

Sa fille Marianne, sera enseignante au collège de Nyon tout en menant une importante carrière politique, d’abord comme députée libérale, puis syndic de Gingins 1986 à 1993.


 Marianne Frisch selon un article du 18 juillet 1975

 

Jacques, l’autre fils d’Edmond, ingénieur en irrigation, fera de nombreux séjours à l’étranger ainsi qu’au sein de la FAO  Rome.

Edmond décède en 1984, à l’âge de 85 ans.



 

Sa femme, née Berger Hélène Marie décédera, en novembre 2000.

A Pompaples dès 1953

En 1954 la Société du Moulin Bornu va chercher  louer ses bâtiments. En 1981 le séchoir à céréales de la Sarraz quitte ces lieux pour s’établir près de la gare de la Sarraz.

 


 .

 

             

La période de Marc Aurèle Rovero, de 1993 à 2006

Dès 1993, Marc Aurèle Rovero, plein d’ambition, va implanter tout une série d’entreprises sur le site du moulin Bornu.


   

Ainsi, au fil des ans, il installera de multiples activités au moulin Bornu : un commerce de produits agricoles, une jardinerie et la vente et installation de piscines.



Mais en été 2006, M. Rovero quitte toutes ses affaires dans la région pour émigrer au Canada.


 

Situation actuelle en 2023.


Le moulin Bornu en mars 2023

L’extérieur des bâtiments du moulin Bornu a été peu modifié.

Et il reste très vivant. Ainsi, une multitude d’activités ont pris place, dans les locaux dans cet ancien moulin.

A part quelques bureaux, vous y trouverez un fabricant de burgers, une distillerie, un éleveur de champignons, une potière et j’en oublie !


 De nombreuses entreprises sont logées dans l’ancien moulin










vendredi 3 février 2023

Le déclin des vignes sur la commune d'Orbe

 

Mais pourquoi a disparu une grande part des vignes de la commune d’Orbe ?

Vers 1890, avec ses 185 ha de vignes, Orbe figurait parmi les plus importantes  communes viticoles de ce canton, mais au fil des ans, elle n’a conservé que 27 ha soit un petit 15%.

Il faut encore préciser que pour ces 27 ha restants, 23 ha sont cultivés  par les vignerons d’Arnex. Ils sont  situés à la Vaux Vully, aux Joncs, aux Pallins et au Creux de Villars.

Citons aussi un viticulteur d’Agiez et un d’Orbe. Pascal Michaud qui plus récemment, avec une nouvelle plantation de 1.5 ha (entre 2012 et 2021) au Creux de Villars, est redevenu le seul vigneron urbigène !

Les vignes actuellement propriétés de la commune d’Orbe

Certes la commune d’Orbe possède encore quelques parchets, mais de petites tailles : 2'018 m2 au Parc Saint Claude et 2'400 m2 aux Nillones, soit à peine un demi hectare, confié à un vigneron d’Arnex.

 

Le vignoble au début du 20 ème siècle 


Quand les vignes arrivaient aux portes de la ville  d’Orbe                                                            Collection Marcel Chevalier

Si nous examinons la carte Siegfried de notre région en 1892, à cette date-là, nous observons un vignoble continu qui s’étendait du village d’Arnex jusqu’à Orbe, mais il y avait aussi  des vignes qui occupaient les pentes situées à l’ouest du Puisoir, tant sur la rive gauche sous Montcherand que sur la droite de l’Orbe. Ainsi qu’au Creux de Rave.

Au nord de la carte de 1892 se trouvaient encore de nombreux parchets vignes occupant le nord de la ville vers la Magnenette, jusqu’aux pentes situées en dessous des mosaïques de Boscéaz.

   


      

Le vignoble de 1892                                                                        Le vignoble de 1935

Cette évolution est bien visible en comparant les différentes cartes de la région, soit celle de 1892 à celle de 1935 et les suivantes.

Entre Arnex et Orbe certains vignobles sont abandonnés et les parcelles de vigne s’effilochent de plus en plus entre le Creux de Villars et la ville d’Orbe, remplacées par d’autres utilisations

 Ainsi la parcelle  Les Perches (en dessous du Devent) est devenue une forêt et les parchets du Gravelet et du Champ Bornu sont transformés en prairies, parfois plus tard en terrains à bâtir près de la ville.
Au printemps 2023 de gros travaux forestiers ont eu lieu sur cette petite forêt.









Le déclin du vignoble depuis 1885 avec une légère reprise dès 1964

Période         Surface               Evolution

1886            185 ha

1918            95.4 ha                  moins 89.6 ha

1935            46 ha                     moins 49.4 ha

1958            31.8 ha                  moins 14.2 ha


1964            16.1 ha                  moins 15.7 ha

1979            24.8 ha                  plus  8.7 ha            de 1968 à 1981 remaniement

2019            26.9 ha                  plus 2.1 ha

 

Mais de ce vignoble disparu, il reste encore quelques vestiges  avec d’anciennes capites perdues au milieu des pâturages ou dans la forêt crée en dessous du Dévent, une forêt qui cache aussi quelques murs de vigne parmi les arbres.

Anciennes capites de vigne, un peu perdues en forêt ou dans un pâturage

 

Dans le même bois subsistent encore quelques vieux murs de vigne.

   

 

·        Anciens murs de vignes recouvertes par une forêt

Les différentes raisons de cette évolution

Ils ne sont malheureusement plus là tous ces urbigènes qui ont abandonné leur vigne depuis 1900.

Il est donc difficile de déterminer leurs raisons exactes. Alors tentons d’en déterminer quelques-unes.

De nouvelles maladies attaquent la vigne

L’oïdium dès 1850, le mildiou dès 1885 et surtout le phylloxéra vers 1890, tout un cortège de nouvelles maladies qu’il a fallu apprendre à combattre, qui provoquent de nouveaux frais de culture et souvent de lourdes pertes.

 

Le développement de nouveaux sites industriels

Sans pouvoir le prouver, je pense que c’est surtout l’arrivée de différentes industries à Orbe qui a favorisé la diminution du nombre de vignerons de cette localité.

Citons :Le Moulin Rod dès 1871

La brasserie Fertig de 1876

L’usine de Daniel Peter vers 1899, devenue Peter-Cailler-Kohler, puis Nestlé en               1929

Le pénitencier de Bochuz vers 1925

La SGG ( Schweizeriche Gemüse Gesellschaf) en 1918 à Chavornay et ailleurs dans la plaine de l’Orbe

Tous ces nouveaux emplois vont fournir des revenus sans doute plus intéressants que ceux obtenus par la culture de la vigne.

Les subsides d’arrachage de la Confédération accentuent la diminution

Le 18 décembre 1953, avec son statut du vin la Confédération propose des subsides d’arrachage pour la vigne. Entre 30 ct et 1.50 par m2. Certains vignerons d’Orbe vont en profiter. Cette mesure fédérale va imputer le vignoble d’une dizaine d’hectares et inquiète fort les responsables de la Coopérative des viticulteurs qui craignent de perdre des membres.

Faible prix du raisin ou du vin vendu

La Gazette de Lausanne du 16 mars 1957 écrit :

’’ Et lorsqu’on interroge ces vignerons, ils vous disent d’un geste un peu las : Que voulez-vous, voici des années que la vigne ne rapporte pas ce que l’on y a mis pour la mener à bien et la main d’œuvre est devenue si rare et si chère ! Les jeunes, plus réalistes que les anciens ne veulent plus perdre leur temps disent-ils, à s’occuper d’une culture qui ne couvre pas ses frais d’exploitation. ‘’

Il est vrai que vers 1950, le prix des raisins n’était pas très haut et dans ses premières années la Cave coopérative d’Orbe crée le 13 juin 1948 va écouler une partie son blanc sous forme de raisins de table et jus de raisin, son PD également en jus de raisin. Une faible quantité de rouge du pays sera vinifiée à Bonvillars.

   Prix de 1948         Prix de 1950

Raisins de table               75 ct/kg           77 ct/kg            

Blancs                             56 ct/kg          68 ct/kg

Rouge hybride                45 ct/kg          50 ct/kg

Rouge du pays                70 à 75ct/kg    75 ct/kg

Et avant 1948, les prix étaient encore plus bas, ainsi en 1922, mon grand-père Emile vendait près de 30'000 litres de vin à la Société de consommation de la Chaux-de Fonds pour 51.5 ct/litre ! Revendu à fr 1.30 la bouteille. 

 

Du vin d’Arnex à la Société de consommation de la Chaux-de-Fonds

 

 

Les grands propriétaires

Les propriétaires du Dévent possédaient une importante  surface de vignes qu’ils  confiaient  à des vignerons.

Mais le coût de ces derniers face aux faibles rendements des ventes de vin va inciter les deux propriétaires à vendre leurs vignes et à se consacrer au domaine agricole.

Ainsi vers 1930, Paul Potterat vend ses vignes pour acheter un pâturage. En 1948 M. Duboux vend aussi une dizaine d’hectares à des vignerons du village d’Arnex. Tous ces parchets sont encore cultivés.

Le remaniement parcellaire a renversé la tendance

Le remaniement viticole mis en œuvre  de 1968 à 1981 sur les communes d’Orbe et Arnex a  touché 59 ha de vigne et 51 ha de terre agricoles.

On a ainsi passé de 660 parcelles de vigne à 175, créé de nouveaux chemins et canalisations pour un montant de fr. 5'667'393 fr. Tous ces travaux ont grandement facilité les travaux et permis ce léger développement d’une dizaine d’hectares supplémentaires.

Pour conclure

Comme déjà dit, les diverses raisons des citoyens d’Orbe d’abandonner cette culture sont multiples et sans doute pas toutes connues.

Mais les nouvelles maladies, la grêle et le gel, les faibles rendements économiques des ventes de vin, les subsides d’arrachage et surtout nouveaux emplois créés dans la localité d’Orbe sont sans doute les acteurs principaux de cet important déclin.